jeudi 19 février 2015

La matière organique dans les chondrites carbonées


La matière organique dans les chondrites carbonées

Résumé
Travaux de recherche entrepris depuis une trentaine d'années par différentes équipes dans le monde sur la matière organique dans les chondrites carbonées.

Laurent Remusat

Institut de Physique du Globe de Paris (IPGP)

Olivier Dequincey

08 - 02 - 2007  

L'auteur remercie chaleureusement Sylvie Derenne, Jean-Noël Rouzaud et François Robert pour leurs commentaires et corrections.

Rappel historique

On connaît la présence de matière organique dans les météorites et notamment les chondrites carbonées depuis le milieu du XIXème siècle et les travaux de Berzelius. La chute de la météorite d'Orgueil, dans le Tarn-et-Garonne, en 1864 va permettre la mise en évidence d'une substance macromoléculaire organique proche des charbons terrestres d'après Berthelot. L'intérêt pour la matière organique des météorites revient vers 1950 avec l'amélioration des techniques analytiques. C'est à ce moment là que les premiers acides aminés sont mis en évidence. Mais très vite il s'avère que ces derniers sont des contaminants terrestres, acquis après la chute de la météorite.
Cependant certaines découvertes majeures allaient montrer que tous les constituants organiques n'étaient pas des contaminants. D'abord les travaux de Miller et Urey en 1953 ont montré que la synthèse abiotique des acides aminés dans certaines conditions favorables était possible. Ensuite la chute de Murchison en Australie en 1969 a permis de nouvelles découvertes. Murchison a été collectée au moment où le programme lunaire de la NASA avait permis de développer des protocoles d'échantillonnage et de collection des échantillons extraterrestres très propres pour réduire au maximum la contamination terrestre. Très vite, il a été montré que cette météorite contient des acides aminés, certains communs sur Terre, d'autres étant inconnus dans l'environnement naturel terrestre. Les arguments structuraux (mélange racémique) et isotopiques (enrichissement en D et 15N par rapport aux composés terrestres) confirment qu'ils sont bien extraterrestres. Au cours des années qui ont suivi, de nombreuses équipes ont décrit le contenu organique des chondrites carbonées, constitué d'une fraction soluble et d'une fraction insoluble.
Si les premiers auteurs ont émis l'hypothèse que cette matière organique était le résultat d'une activité biologique extraterrestre, il est communément admis aujourd'hui que cette matière organique est d'origine abiotique, c'est-à-dire produite par des processus purement chimiques. Par contre la question qui se pose actuellement est de comprendre si les composés organiques que l'on retrouve dans les météorites, mais aussi dans les comètes ou dans le milieu interstellaire, ont pu influencer l'apparition et le développement de la vie sur Terre, et donc pourquoi pas sur d'autres planètes. Ce problème rejoint le concept de la « soupe prébiotique » dans les océans de la Terre primitive, qui permit la formation des premières formes de vie.

Rappel sur les chondrites carbonées

Les chondrites carbonées sont considérées comme les météorites les plus primitives du système solaire. Parmi les arguments que l'on peut citer, leur composition élémentaire est très proche de celle du soleil, qui représente la majeure partie de la matière qui a constitué le système solaire (figure 1). Cette observation montre qu'elles n'ont pas subi de profondes modifications géochimiques depuis leur formation, en particulier elles sont issues de corps parents non différenciés et très probablement petits (moins de 20 km de diamètres).

Comparaison entre la composition élémentaire des chondrites carbonées et celle du Soleil
Une excellente corrélation apparaît, sauf pour les éléments volatils (hydrogène, hélium, gaz rares, carbone …) qui sont difficiles à piéger dans les silicates.

Les chondrites carbonées sont caractérisées par leur richesse en carbone, en eau et en volatiles (en particulier gaz rares) par rapport aux autres chondrites. Leur minéralogie est très variable selon la classe (figure 2). Les plus hydratées, les CI (nommées ainsi à partir de la météorite modèle d'Ivuna), ne présentent pas de chondres, sont constituées de silicates hydratés, de magnétite et de troïlite (sulfure de fer). Les CM (ressemblant à Mighei) contiennent des chondres constitués de pyroxènes et d'olivine dans une matrice proche de celle des CI. Les CV (même classe que Vigarano) présentent des inclusions blanches, appelées inclusions réfractaires, assemblages de plagioclases, spinelle, pérovskite et métaux.

Les chondrites carbonées se divisent en plusieurs classes, les plus communes sont les CI, les CM et le CV
Elles sont caractérisées par une teneur élevée en carbone. On peut établir que ces chondrites se différencient les unes des autres par un hydrothermalisme ou un métamorphisme de haute température, lié à leur teneur en eau et en carbone.
Sources des images : IvunaMurchisonAllende.

Comme leur nom l'indique, les chondrites carbonées sont riches en carbone (jusqu'à 5 % en masse). Ce carbone se trouve sous différentes formes : carbonates, grains de carbure de silicium, diamants, grains de graphite et matière organique. Celle-ci représente la plus grande partie du carbone. Cette matière organique est présente sous une fraction soluble dans les solvants usuels et une fraction insoluble, qui représente de 75 à 95 % de la masse totale de matière organique.

Les composés solubles

Les composés solubles dans l'eau et les solvants organiques des météorites ont surtout été décrits pour Murchison (CM2), en raison de problèmes de contamination et de plus faible abondance dans les autres chondrites carbonées. On peut extraire une multitude de composés solubles d'origine extraterrestre. Ont ainsi été mis en évidence plusieurs familles d'acides carboxyliques, des hydrocarbures linéaires et aromatiques, des alcools, des cétones et des composés azotés comme des amines, des acides aminés ou des hétérocycles azotés (figure 3).

Répartition des composés solubles dans la météorite de Murchison
Les composés solubles les plus abondants sont les acides carboxyliques. On distingue aussi des hydrocarbures (alcanes, composés aromatiques), des alcools, des cétones, des aldéhydes et des composés azotés comme les acides aminés. Certaines molécules sont dites d'intérêt biologique car intervenant (ou pouvant intervenir) dans les cycles biologiques connus sur Terre.

Les acides aminés

Parmi les composés solubles, certains ont suscité plus d'intérêt que d'autres. C'est le cas des acides aminés (voir figure 4). Ils sont facilement extraits dans l'eau chaude. Dès les années 70, il a été établi que ces acides aminés n'étaient pas des contaminants, sur la base de plusieurs arguments (mélanges racémiques, composition isotopique en 13C, inconnus à l'état naturel sur Terre). Ces arguments ont permis de mettre en évidence que des acides aminés abiotiques étaient contenus dans les chondrites carbonées, associés à une part de contamination facilement mise en évidence par sa composition isotopique.

Les acides aminés dans les météorites
a) les formes L et D - b) les différents types d'acides aminés extraterrestres (ne sont représentés que des acides α-aminés) - c) acides α-, β- et γ- aminés (R représente une chaîne alkyle).

Depuis, 74 acides aminés ont été mis en évidence dans Murchison pour une teneur estimée à 60 ppm. Sur ce nombre, 8 sont constitutifs des protéines (alanine, glycine, valine, leucine, isoleucine, proline, acide aspartique et acide glutamique), 11 sont moins communs (par exemple la β-alanine ou l'acide γ-aminobutyrique) et les 55 autres n'existent pas dans le monde vivant sur Terre. Leurs caractéristiques moléculaires les distinguent des acides aminés terrestres. D'abord, le nombre de carbones dans ces composés va de 2 à 8, on remarque que l'abondance du composé décroît quand le nombre de carbones augmente. De plus les formes ramifiées sont prédominantes. Une grande diversité structurale est observée, avec pratiquement tous les isomères possibles détectés, même si les acides α-aminés sont plus abondants que les formes β ou γ (position du groupe NH2 par rapport au groupe COOH). Il est important de noter que les acides aminés ne sont détectés que dans les chondrites carbonées à matrice argileuse.
Contrairement aux acides aminés terrestres, où seulement la forme L des acides α-aminés existe, les acides aminés extraterrestres ont été au début détectés en mélanges racémiques, c'est-à-dire que les formes L et D sont détectées en quantités équivalentes, ce qui a ainsi donné un critère pour les attribuer à une synthèse abiotique (comme la synthèse de Strecker pour certains) et les séparer des contaminants. Il a été détecté une légère prédominance de la forme L pour l'alanine, l'acide glutamique, la proline, la leucine et l'acide aspartique. Les analyses de δ13C et δ15N ont montré que ces excès n'étaient pas un effet de contamination terrestre. Une autre étude a mis en évidence que certains acides α-méthyl α-aminés (par exemple l'isovaline) montraient eux aussi un excès de la forme L. Les réactions abiotiques de synthèse des acides aminés connues sont incapables d'être responsables de la prédominance d'une forme par rapport à l'autre. L'hypothèse la plus acceptée est liée à une irradiation des acides aminés par des rayonnements polarisés qui favoriserait une forme plutôt que l'autre. Cette observation a aussi des conséquences sur les hypothèses d'apparition de la vie à partir des molécules extraterrestres (panspermie) ; l'excès de formes L pour certains acides aminés a pu avoir une conséquence pour l'apparition de la vie en la forçant à adapter des formes L, ce qui serait à l'origine de la prédominance des formes L dans les acides aminés et les protéines des êtres vivants.
Les acides aminés montrent une composition isotopique très enrichie en isotopes lourds. Des valeurs très élevées de δD, de δ13C et de δ15N ont été mesurées (tableau ci-dessous) pour l'ensemble des acides aminés de Murchison. Ces valeurs sont interprétées comme la signature d'une origine interstellaire pour les acides aminés ou leurs précurseurs. Les données isotopiques ont été précisées plus récemment par des mesures moléculaires, par l'utilisation de la GC-irMS (chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse isotopique). Ainsi on connaît maintenant la composition isotopique de certains acides aminés individuels. Les données sur l'azote montrent que les acides aminés ont un δ15N de 60‰ en moyenne, aussi bien pour les formes L que les formes D. Cependant la glycine est appauvrie (37‰) alors que la sarcosine et l'acide α-amino-isobutyrique sont enrichis en 15N ; ces écarts sont attribués à des processus de synthèses ou des précurseurs différents des autres acides aminés ou à des fractionnements isotopiques différents. Les valeurs de δ13C des composés individuels montrent que le δ13C diminue quand le nombre de carbones augmente, pour les acides α-aminés. Ces données suggèrent une synthèse des acides aminés ou de leur précurseur par addition de carbones contrôlée cinétiquement, les composés contenant du 12C réagissant plus rapidement que ceux contenant du 13C. Il a ensuite été mis en évidence que les acides α-, β- et γ- aminés ne montrent pas la même tendance, ce qui peut être interprété comme la signature d'un processus de synthèse différent. Enfin les mesures moléculaires de δD ne montrent pas de tendance flagrante et ne sont pas encore interprétées en terme de processus de synthèse. Elles montrent cependant une très forte variabilité d'un acide aminé à l'autre, les acides aminés substitués étant plus riches en D que les chaînes linéaires.

Les autres composés « d'intérêt biologique »

En plus des acides aminés, d'autres composés pouvant avoir une relation avec le monde biologique ont été détectés. Ainsi, récemment, une série de sucres et de molécules dérivées (polyols avec fonctions acide ou alcool à la place de la fonction cétone ou aldéhyde) a été reportée. L'abondance est similaire à celle des acides aminés, tout comme eux une diversité d'isomères et un enrichissement en isotopes lourds sont observés. Il est important de noter qu'aucun de ces sucres n'existe dans le monde vivant sur Terre.
Parmi les composés azotés, des purines, des pyrimidines, des quinolines et des pyridines sont détectées. Ces composés peuvent intervenir dans la formation de molécules de type bases azotées, et ont donc pu participer à la synthèse dans des environnement prébiotiques à la formation de molécules de type ARN ou ADN.
Il existe donc dans les météorites une multitude de composés qui ont pu participer à l'apparition de la vie sur Terre et dans d'autres environnements du système solaire. Il faut souligner que la plupart de ces composés, bien que très proches, ne sont pas présents dans le monde vivant connu sur Terre. Ceci signifie que s'ils ont effectivement permis l'apparition de la vie, son évolution a permis l'apparition d'autres composés différents de ces "précurseurs".

Les autres composés solubles extraterrestres

On ne trouve pas que des molécules dites « d'intérêt biologique » dans les météorites. Les composés les plus abondants sont des acides carboxyliques. On trouve aussi des hydrocarbures comme des alcanes, ou des composés aromatiques polycycliques. Une famille d'alcools est aussi présente.
Tous les composés solubles ont cependant des propriétés similaires :
  • une diversité structurale, tous les isomères possibles sont détectés, sans prédominance d'une forme ou d'une autre ;
  • une abondance qui décroît quand la taille de la molécule augmente ;
  • un enrichissement en isotopes lourds : D, 13C et 15N.
Ces critères permettent donc sans ambiguïté de distinguer les composés solubles extraterrestres des contaminants terrestres.

La matière organique insoluble (MOI)

La matière organique dans les chondrites carbonées est majoritairement présente sous la forme d'une macromolécule insoluble dans les solvants usuels (eau et solvants organiques). Elle représente en effet 75 à 95% en masse de la matière organique totale des chondrites carbonées. Elle est isolée après extractions aux solvants (pour éliminer la fraction soluble) et attaque acide (HF/HCl) des météorites qui vise à détruire la matrice minérale. Le résidu obtenu par ce traitement est très enrichi en matière organique insoluble mais peut parfois contenir jusqu'à 50% de minéraux réfractaires (oxydes par exemple) ou protégés par la matière organique. Cette MOI est considérée comme le réservoir majeur de gaz rares dans les chondrites carbonées, elle contient aussi des grains dit "présolaires", c'est-à-dire plus vieux que le système solaire, sous la forme de grains de carbures de silicium, de nanodiamants ou de grains de graphite.
Les techniques classiques de géochimie organique utilisées pour caractériser les kérogènes ou les charbons terrestres ont été appliquées à la MOI. À cause de ses propriétés physico-chimiques, elle est moins bien connue que la fraction soluble. Deux approches sont classiquement utilisées pour l'étudier : une approche spectroscopique, qui donne accès à une vue globale et moyennée de la MOI sans la dégrader, et une approche par dégradations (soit thermiques soit chimiques) qui offre l'avantage d'apporter des informations moléculaires plus précises mais seulement sur la partie la moins réfractaire à ces traitements. Ces informations moléculaires sont complétées par des données isotopiques en particulier du carbone et de l'hydrogène. Des observations microscopiques (photonique et électronique) ont aussi été effectuées.

L'étude moléculaire

Les analyses élémentaires effectuées sur la MOI de différentes chondrites carbonées montrent qu'elle est constituée d'un squelette carboné, avec de l'hydrogène, de l'oxygène, de l'azote et du soufre (formules structurales types : C100H72O18N3,5S2 pour Orgueil et C100H70O22N3S6,5 pour Murchison). La MOI a été analysée par oxydations chimiques et pyrolyses couplées à la chromatographie en phase gazeuse. L'identification des fragments est rendue possible par l'utilisation de la spectrométrie de masse moléculaire. La détermination des fragments issus de la dégradation d'une macromolécule insoluble permet de reconstituer sa structure, plus précisément de déduire ses unités structurales. En effet ces attaques thermiques ou chimiques n'ont pas les rendements suffisants pour « solubiliser » toute la MOI. On analyse seulement la fraction la plus labile de la MOI. Ces analyses doivent ensuite être complétées par des études spectroscopiques comme par exemple par RMN à l'état solide ou par spectrométrie infra-rouge.
Les données récoltées au cours des 25 dernières années permettent de dresser un modèle moléculaire de la MOI des CI et CM. Il apparaît que sa structure moléculaire (voir figure 5) est constituée d'unités aromatiques comportant au maximum 10 cycles aromatiques (noyaux benzéniques) reliées entre elles par des chaînes aliphatiques courtes (jusqu'à 6 carbones) et ramifiées (avec des groupements méthyles ou éthyles, avec parfois des ramifications). La structure est donc très réticulée, c'est-à-dire que de nombreuses interconnexions sont présentes entre les différentes unités aromatiques. L'oxygène semble faire partie des liaisons entre les unités aromatiques sous la forme de fonctions éther ou ester. L'azote et le soufre semblent être inclus dans les unités aromatiques sous la forme d'hétérocycles azotés (noyaux pyrroles) et soufrés (noyaux thiophènes). Ainsi, contrairement à ce qui avait été proposé avec l'étude des premiers échantillons extraterrestres, bien qu'ayant une composition élémentaire similaire aux kérogènes et charbons terrestres, la MOI des chondrites carbonées a une structure très différente, héritée d'un processus très différent de celui qui a donné les MO fossiles terrestres.

Principales caractéristiques moléculaires de la MOI résumées dans un schéma "qualitatif
R représente un groupe aromatique ou aliphatique.

Une caractéristique structurale supplémentaire distingue la MOI des kérogènes et charbons terrestres. Les fragments obtenus par dégradation thermique ou chimique de la MOI possèdent des propriétés communes avec les composés solubles extraterrestres : plus leur nombre de carbone augmente, plus leur abondance diminue et tous les isomères possibles sont détectés sans prédominance d'une forme ou d'une autre. Ceci prouve que la MOI a été synthétisée par un processus abiotique, contrairement aux kérogènes et aux charbons terrestres qui proviennent de la maturation de matière organique fossile d'origine végétale, qui a gardé les traces de la spécificité isomérique des processus biologiques.
L'utilisation de la RPE (Résonance Paramagnétique Electronique) a permis de mettre en évidence la présence de radicaux (avec un électron célibataire) et de diradicaloïdes (deux électrons célibataires) organiques dans la MOI. La signature en RPE de la MOI est très différente des échantillons organiques terrestres, de plus elle contient des régions très enrichies en radicaux alors que dans la matière organique des sédiments terrestres les radicaux sont répartis de manière homogène.
La MOI des autres classes de chondrites carbonées est beaucoup moins bien connue car elle semble être beaucoup plus aromatique et donc plus résistante aux techniques d'étude. De plus la teneur en matière organique et l'abondance de ces météorites est trop faible pour permettre leur étude avec les outils actuels de géochimie organique.

Les études structurales

Ces études moléculaires ont été confortées par des observations en microscopie électronique. L'observation en microscopie électronique à transmission à haute résolution (METHR) permet d'observer le profil des feuillets aromatiques dans la MOI. Une méthode d'analyse d'image permet d'accéder à des données structurales quantitatives (longueur des feuillets, nombre de feuillets empilés, distances interfeuillets, …). Ces données ont confirmé la taille moyenne proposée à partir des études par RMN 13C à l'état solide. En METHR, la MOI d'Orgueil et de Murchison apparaît comme une structure homogène peu organisée, avec des plans aromatiques assez écartés et formant des empilements d'unités aromatiques limités à 2 à 4 feuillets. Par contre, dans les CV (par exemple Allende) ou les CO, la MOI est plus hétérogène : une partie montre des structures similaires à celles des CI et CM mais on visualise aussi des carbones mieux organisés formés d'empilements d'un nombre plus important de feuillets plus longs et plus plans, la distance inter-feuillets tendant à se rapprocher de celle du graphite (0.335 nm) comme le montrent des plis de lamelles de graphite (figure 6). Cette évolution est interprétée comme étant la conséquence de l'effet d'un métamorphisme thermique qui aurait affecté les corps parents des chondrites de types 3 à 6.

Images en microscopie électronique à transmission haute résolution de la MOI de Kainsaz (CO3)
Chaque image représente un carré de 50 nm de côté. Sur ces images apparaissent des franges représentant le profil des feuillets polyaromatiques. -A) carbone microporeux ; les parois des micropores sont formées de l'empilement de quelques feuillets. -B) carbone microporeux un peu plus organisé, avec domaines d'empilement plus grands : le nombre de feuillets empilés et la longueur des feuillets sont un peu plus grands que dans A. -C) carbone très graphitisé : les feuillets sont longs et plans, les empilements sont formés de plusieurs dizaines de feuillets et la distance interplans est minimale et proche de celle du graphite (0,335 nm).

L'utilisation de la spectrométrie Raman confirme ces observations : le spectre Raman de la MOI des chondrites de type CO ou CV montre une augmentation de l'organisation structurale et une diminution des défauts quand le degré de métamorphisme augmente (contrainte thermique plus importante).

Les données isotopiques

L'analyse isotopique de la MOI a été menée dans le but de comprendre l'origine et l'évolution de la MOI. On connaît ainsi les rapports D/H, 13C/12C et 15N/14N globaux de la MOI. Très récemment, les valeurs du D/H et du 13C/12C ont été mesurées de manière spécifique, c'est-à-dire sur des fragments moléculaires de la MOI. Ce genre d'études permet de déterminer de manière précise les rapports isotopiques au niveau moléculaire. Toutes ces mesures montrent que la MOI est enrichie en isotopes lourds. Ceci est particulièrement remarquable pour le rapport D/H. Celui-ci varie de 260 à 540 .10-6 (c'est-à-dire que le δD correspondant varie de 650 à 2500‰) suivant les chondrites carbonées. Cet enrichissement important est le signe de processus de type interstellaire : réactions d'échanges se déroulant à basse température dans des environnements soumis à des rayonnements UV intenses. Les forts enrichissements en D seraient hérités de processus précédant la formation des corps parents des chondrites carbonés, car une fois que la MO est incorporée au corps parent, celui-ci la protège des rayons UV. Le débat actuel porte sur la localisation de ces réactions d'enrichissement : dans un environnement interstellaire, ce qui impliquerait que la MOI soit un « polluant » organique de la nébuleuse qui a formé le système solaire, donc qu'elle soit formée avant la nébuleuse, ou bien elles ont eu lieu dans les premiers instants du système solaire, en périphérie de la nébuleuse où le gaz est froid et les rayonnements UV importants. Dans ce dernier cas, la synthèse de la MOI serait contemporaine de celle des premiers solides « solaires ». Récemment l'utilisation des sondes ioniques à l'échelle nanométriques (NanoSIMS) a permis de mettre en évidence des zones extrêmement enrichies en D dans la MOI avec un rapport D/H allant jusqu'à 1200.10-6 (figure 7). Leur signification est débattue.

Image NanoSIMS en rapport isotopique D/H
Cette image représente une région de 40 sur 40 μm. Cette image montre la présence de régions très riches en D, mais aussi très petites. Ces régions sont nommées hot spots et apparaissent en couleur très claire.

Les mesures individuelles de δ13C sur les fragments de la MOI montrent un lien génétique probable entre cette dernière et les hydrocarbures aromatiques solubles contenus dans les météorites. Ces hydrocarbures pourraient avoir été formés par dégradation d'une partie labile de la MOI.

L'origine de la MOI ?

De nombreux critères moléculaires et isotopiques rapprochent la MOI de la matière organique détectée dans les milieux interstellaires. Tout d'abord son caractère aromatique très marqué. Parmi les espèces organiques détectées dans l'espace, on trouve des HAPs (Hydrocarbures Polyaromatiques). Le parallèle avec la MOI a été rapidement fait même si les HAPs interstellaires sont majoritairement plus gros (plus de cycles) que les unités polyaromatiques de la MOI. Il faut toutefois noter que les plus petits PAHs sont connus pour être détruits par un fort rayonnement UV ; les unités aromatiques des météorites pourraient donc représenter la distribution initiale. Une autre propriété de la matière organique dans les milieux interstellaires est son enrichissement en deutérium. Ceci a conduit de nombreux auteurs à proposer une origine interstellaire pour la MOI et certains composés solubles à cause de leur enrichissement en deutérium. Cependant les enrichissements en D observés dans les molécules organiques interstellaires sont beaucoup plus importants que ceux mesurés dans la MOI. L'origine de la MOI est donc toujours sujette à débat.
Il apparaît cependant que l'histoire de la MOI est complexe, car elle a sûrement été affectée par de nombreux événements comme la formation du système solaire et la condensation des premiers solides, l'altération hydrothermale ou le métamorphisme haute température sur le corps parent, les irradiations, etc. On est donc encore loin d'avoir un scénario accepté par tous sur l'origine de la MOI et son évolution entre sa formation et aujourd'hui.

Conclusion

Les chondrites carbonées contiennent donc une grande variété de composés organiques, très différents des composés terrestres et qui sont très probablement d'origine abiotique. Cependant de nombreux auteurs proposent que cette matière organique ait pu servir de substrat au développement de formes de vie primitives sur Terre ou ailleurs dans le système solaire. En effet on peut facilement imaginer que ce contenu organique ait pu être apporté sans être dégradé sur la Terre Primitive et ainsi participer, au travers de la « soupe prébiotique » océanique, à l'apparition des premières formes de vie terrestres. Les estimations montrent en effet que la quantité de matière organique d'origine extraterrestre apportée sur Terre depuis sa formation est supérieure à la biomasse vivante actuelle. Cet apport continu de matière organique extraterrestre se déroule encore aujourd'hui.

Quelques références

Voir aussi l'article L'origine de la vie : apports de la géologie et de l'astronomie, par Pierre Thomas.
Articles dont sont tirées les données isotopiques du tableau.
  • [1] M. H. Engel , S. A. Macko, J. A. Silfer, 1990. Carbon isotope composition of individual amino acids in the Murchison meteorite. Nature 348, 47-49
  • [2] M. H. Engel , S. A. Macko, 1997. Isotopic evidence for extraterrestrial non racemic amino acids in the Murchison meteorite. Nature 389, 265-267
  • [3] S. Pizzarello, R. V. Krishnamurthy, S. Epstein, J. R. Cronin, 1991. Isotopic analysis of amino acids from the Murchison meteorite. Geochimica et Cosmochimica Acta 55, 905-910
  • [4] S. Pizzarello, X. Feng, S. Epstein, J. R. Cronin, 1994. Isotopic analysis of nitrogenous compounds from the Murchison meteorite : ammonia, amines, amino acids and polar hydrocarbons. Geochimica et Cosmochimica Acta 58, 5579-5587
  • [5] S. Pizzarello, Y. Huang, 2005. The deuterium enrichment of individual amino acids in carbonaceous meteorites : a case for the presolar distribution of biomolecule precursors. Geochimica et Cosmochimica Acta 69, 599-605
  • [6] F. Robert, S. Epstein, 1982. The concentration and isotopic composition of hydrogen, carbon and nitrogen in carbonaceous meteorites. Geochimica et Cosmochimica Acta 46, 81-95
Autres articles.
  • François Robert, 1997. Les espèces chimiques du carbone dans les milieux extraterrestres, in Le Carbone dans tous ses états, P. Bernier & S. Lefrant (eds), Gordon & Breach Science Publishers, 83-126.
  • Michel Maurette, 2001. La matière extraterrestre primitive et les mystères de nos origines, in L'environnement de la Terre primitive, M. Gargaud, D. Despois et J.-P. Parisot (eds), Presses universitaires de Bordeaux, 99-127
  • Jacques Reisse, 2001. À propos de l'origine de la matière organique sur la Terre primitive et son évolution durant la période prébiotique, in L'environnement de la Terre primitive, M. Gargaud, D. Despois et J.-P. Parisot (eds), Presses universitaires de Bordeaux, 323-342
  • S. Pizzarello, G.W. Cooper, G.J. Flynn, 2006. The nature and distribution of the organic material in carbonaceous chondrites and interplanetary dust particles, inMeteorites and the Early Solar System II, D. Lauretta, H.Y. McSween (eds), University of Arizona Press, 625–651
  • I. Gilmour, 2003. Organic matter in meteorites, in Treatise on geochemistry, volume 1 : Meteorites, Comets, and Planets, A.M. Davis (ed), Elsevier
  • Une page web en anglais, sur le site du remote sensing tutorial du centre Goddard Space Flight Center de la NASA.
Remarque : signification du δ : c'est l'écart relatif entre le rapport isotopique d'un échantillon et celui d'une référence, il s'exprime en ‰ suivant la formule suivante :
Dans le cas du δD, la référence est le SMOW ( Standard Mean Ocean Water ), qui a un D/H=155,76.10-6.

vendredi 13 février 2015

L'Astrologie




L'Astrologie



L'astrologie est un ensemble de traditions et de croyances qui soutient que la position des planètes dans le système solaire apporte des informations permettant d'analyser ou de prédire des événements humains, collectifs ou individuels.
L'usage populaire du terme astrologie renvoie généralement à l'astrologie occidentale, à laquelle le présent article est consacré.
Ses versions populaires sont les horoscopes des revues ou les affinités des signes du zodiaque. Si elles sont généralement considérées comme des échos lointains et déformés de l'astrologie historique, elles en restent la manifestation et l'expression la plus répandue.
Les scientifiques considèrent l'astrologie comme une pseudo-science ou une superstition, l'ensemble des recherches menées depuis la fin du 19e siècle ayant abouti à la réfutation des prétentions de la discipline.
Face à ces considérations, les défenseurs de l'astrologie tendent à en réduire le caractère déterministe. Selon certains astrologues, leur discipline n'a même pas pour but premier la prédiction de l'avenir, l'astrologie pouvant notamment être une voie du développement personnel
Les croyances associées à l'astrologie restent populaires (voir ci-après). Un sondage mené en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne indique qu'une personne sur quatre pense que « la position des étoiles et des planètes peut affecter la vie d'une personne »

Étymologie

Le mot « astrologie » vient du grec αστρολογία, de άστρονastron, (« étoile ») et λόγος (logos), dont la signification est liée à la notion de « discours » (λογία est un suffixe désignant d'une manière générale une discipline ou une matière d'enseignement). Étymologiquement, l'astrologie est donc le « discours sur les astres » : elle s'intéresse principalement au soleil et aux planètes du système solaire et, dans une moindre mesure, aux étoiles (SpicaAntarèsRegulus, par exemple) et aux nébulosités (Andromède), appelés astres fixes ou étoiles fixes.

Définition                                                                                                              Il existe un grand nombre de pratiques astrologiques différentes, mais certaines constantes se dégagent :

L'astrologie est l'étude des relations supposées entre les affaires terrestres et les phénomènes célestes en général.
Plus précisément, elle repose sur 4 cycles principaux et leurs applications analogiques :
  • le jour (astronomiquement : la rotation de la Terre sur elle-même)
  • le mois (astronomiquement : le cycle soli-lunaire)
  • l'année (astronomiquement : la rotation de la Terre autour du Soleil)
  • la « grande année » (astronomiquement : le cycle de la précession des équinoxes, d'une durée d'environ 25 800 ans)

À partir de ces cycles, ont été mises au point diverses techniques, dont les principales utilisent :
- la position des planètes, des luminaires (Soleil et Lune), des comètes et des astéroïdes (depuis leur découverte au xixe siècle) :
  • sur (ou autour de) l'écliptique, un indicateur de leur trajectoire apparente dans le ciel, et/ou sur l'arrière-plan des étoiles et/ou des constellations, zodiacales et/ou autres.
  • par rapport aux autres (planètes, luminaires, etc.), en prêtant une attention particulière aux angles formés (les aspects : conjonction (0⁰) et opposition (180⁰), angles divers (carrés (90⁰), trigones (120⁰), quintiles (72⁰, soit un cinquième de cercle) depuis Kepler, etc.)
  • dans le ciel local ( l'horizon, au zénith et au nadir) dont le découpage est utilisé de diverses manières (systèmes des maisons astrologiques), et dont l'application la plus connue est l'ascendant.
- les cycles de ces corps célestes et de certains axes (axe des éclipses, axes des équinoxes et des solstices, essentiellement8) :
  • cycles régulateurs de la vie sur terre : cycles du Soleil, de la Lune ;
  • cycles simples de MercureVenusMars (presque 2 ans), Jupiter (12 ans), Saturne (29 ans) ;
  • cycle de la précession des Nœuds Lunaires (également appelé Axe du Dragon, ou Tête et Queue du Dragon) (18,6 ans) ;
  • cycles simples des planètes transaturniennes et des corps transaturniens : Chiron (50 ans), Uranus (84 ans), Neptune (165 ans), Pluton (246 ans) ;
  • cycles des nouveaux corps découverts aux confins de notre système solaire, dits objets transneptuniens ou TNO 9, orbitant dans la Ceinture de Kuiper : VarunaIxion,QuaoarOrcusHauméaMakémaké, etc. ; ou croisant au large de la Ceinture de Kuiper, dans la Falaise de Kuiper : Eris (557 ans), Sedna (durée du cycle estimée de 10 500 à 12 000 ans), etc ;
  • cycles des systèmes doubles ou triples, marquant des périodes plus ou moins longues, à l'image du cycle soli-lunaire : cycle Jupiter-Saturne (20 ans) 10 (cycle parfois appelé cycle de la Grande Conjonction11, et traditionnellement associé au passage des décennies) ; cycle Uranus-Neptune (170 ans) ; cycle Neptune-Pluton (495 ans)12 ;
  • ères dites astrologiques (s'étendant sur des millénaires : 2160 ans environ) ;
  • grand cycle de la précession des équinoxes ("Grande Année") (s'étendant "actuellement" sur 25 760 ans, soit 26 000 ans environ) ;
  • cycles encore plus longs : cycle de la variation de l'obliquité (inclinaison de l'équateur sur l'écliptique) (41 000 ans), cycle de la variation de l'excentricité de l'orbite terrestre (413 000 ans, plus une composante qui fluctue entre 95 000 et 125 000 ans) ; avec la précession des équinoxes, ces 3 paramètres (dits Paramètres de Milanković) interviennent dans les variations climatiques planétaires naturelles à long terme : périodes glaciaires et réchauffements interglaciaires) ; ces cycles longs sont donc de la plus haute importance pour la survie des civilisations, qui ont donc tout intérêt à en tenir compte13.

Dans la pratique astrologique concrète, de nombreux éléments sont utilisés. Ces éléments sont principalement 14 :
  • les planètes (incluant les luminaires et les planétoïdes) (Soleil, Lune, Mercure, Venus, Mars, Jupiter, Saturne, Chiron, Uranus, Neptune, Pluton, etc.)
  • les étoiles fixes (principalement : Algol, les Pléiades, Aldébaran, Rigel, Capella, Sirius, Procyon, Régulus, Spica, Arturus, Antarès, Véga, Altaïr, Fomalhaut, Achernar) ;
  • les points fictifs (nœuds Nord et Sud de la Lune, Lune Noire, queue de la Lune Noire, nœuds des planètes, Soleil Noir, part de fortune et autres parts, vertex, etc.) ;
  • les signes du zodiaque tropical (au nombre de 12) (Bélier, Taureau, Gémeaux, Cancer, Lion, Vierge, Balance, Scorpion, Sagittaire, Capricorne, Verseau, Poissons) ;
  • les constellations du zodiaque (en astrologie sidérale) ;
  • les demeures de la Lune (27 Nakshatra, en astrologie védique ; 27 Xiu, en astrologie chinoise ; 28 jours lunaires, en astrologie arabe) ;
  • les degrés symboliques du zodiaque tropical (au nombre de 360) ;
  • les axes de l'horizon et du méridien (relativement à la position géographique) ;
  • les systèmes de domification (Placidus, Campanus, Régiomontanus, Morinus, Alcabitius, Porphyre, Koch, védique, topocentrique, égal, entier, nul, etc.) ;
  • les maisons (numérotées de 1 à 12) (exemple : la maison 6) ;
  • les cuspides des maisons (principalement : l'ascendant, le descendant, le milieu du ciel, le fond du ciel) ;
  • les éléments (quadruplicité : Feu, Air, Terre, Eau) ;
  • les modes (triplicité : cardinal, fixe, mutable) ;
  • les aspects en longitude (aspects majeurs : conjonction, opposition, trigone, carré, sextile ; aspects mineurs : quintile, semi-sextile, quinconce, octile, sesqui-carré, novile, etc.) ;
  • les aspects en latitude (parallèle de déclinaison et contre-parallèle) ;
  • les aspects applicants ou séparants (c'est-à-dire qui se trouvent en phase d'application ou de séparation) ;
  • les planètes rétrogrades (c'est-à-dire qui se trouvent en phase de rétrogradation) ;
  • les mi-points.
À ceci s'ajoutent les significations des diverses interactions de ces éléments :
  • les planètes et points fictifs en signes (exemples : Mercure en Vierge ; nœud Sud en Vierge) ;
  • les planètes et points fictifs en maisons (exemple : Mercure en maison 6 ; nœud Sud en maison 6) ;
  • les cuspides des maisons en signe (exemples : ascendant Vierge ; maison 6 en Vierge) ;
  • les signes interceptés et les maisons liées
  • les maîtrises planétaires (exemple : Mercure est considéré comme étant maître des Gémeaux et de la Vierge) ;
  • les réceptions mutuelles entre des planètes en signes ;
  • les aspects entre planètes (exemple : Mercure opposé à Neptune) ;
  • les planètes isolées (c'est-à-dire qui ne forment aucun aspect majeur) ;
  • les configurations d'aspects (amas, stellium, grand trigone ou triangle majeur, triangle mineur, cerf-volant, yod ou « doigt du ciel », boomerang, bateau ou tente, maison, étoile de David, étoile à 5 branches, grand carré ou croix cosmique, T-carré, rectangle mystique, autres rectangles) ;
  • les formes générales de répartition des planètes dans le thème astral (coin ou grappe, bol ou hémisphère, éventail, seau ou entonnoir, balançoire, trépied ou extension, croix, locomotive, éclaboussure) ;
  • les thèmes harmoniques.
À ceci s'ajoutent enfin, pour l'astrologie dite prédictive :
  • les transits planétaires (exemple : Neptune en transit sur Mercure natal en Vierge) ;
  • les progressions (directions symboliques, sirections primaires, directions secondaires, thèmes progressés, révolutions solaires, etc.) ;
  • les éclipses du Soleil et celles de la Lune ;
  • les passages de comètes15.

Astrologie et Astronomie

On rencontre souvent l'affirmation selon laquelle les Anciens ne distinguaient pas l'astrologie de l'astronomie. Les astronomes grecs de l'Antiquité, même s'ils ne l'affirmaient pas explicitement, faisaient clairement la différence. Ptolémée traite d'astronomie et d'astrologie dans deux ouvrages distincts, respectivement l'Almageste et le Tetrabiblos.
L'astrologie s'est toujours nourrie des découvertes de l'astronomie. En effet, l'astrologie se fonde sur des calculs astronomiques pour établir les thèmes astraux, et souhaite utiliser les éphémérides les plus précises possible pour déterminer les positions des corps célestes. En outre, avant la diffusion à grande échelle de ces éphémérides (ou des logiciels qui les incluent), l'astrologue devait lui-même, et souvent à l'œil nu, déterminer les positions des astres. Il fallait donc nécessairement être aussi astronome avant de prétendre être astrologue.

Histoire de l'astrologie                                                                       Selon Geoffrey Cornelius et Paul Devereux, « plus d'un site archéologique antique présente des preuves irréfutables d'un alignement avec des phénomènes tels les levers de Soleil aux solstices et équinoxes, les couchers de Lune aux maxima et minima de déclinaison et, parfois, avec les étoiles ou les planètes. »16.

Pour l'observateur contemporain comme pour son ancêtre paléolithique, le ciel nocturne est un motif d'émerveillement. La Voie lactée a été vue dans la plupart des cultures comme une sorte d'élément fluide primordial (Voir Interprétations mythologiques de la Voie lactée). Sur un plan astronomique, nous « venons » effectivement de ce grand ensemble—c'est notre galaxie.
Ce n'est que bien plus tard dans l'histoire, avec Aristote, qu'allait être introduite la spéculation que la Voie lactée n'était qu'un phénomèneatmosphérique infralunaire, croyance qui allait perdurer jusqu'au Moyen Âge.
Les astérismes sont reconnaissables par l'astronome moderne comme pour l'observateur paléolithique parce qu'ils présentent des régularités, que l'on nomme gestalts. La façon dont les observateurs perçoivent, de façon reproductible et prévisible, les constellations est un exemple paradigmatique dans la théorie de la perception gestaltiste.


La constellation du Cygne, à la forme de croix caractéristique
.


Cassiopée, aisément identifiable par sa forme en W
.
Cependant, ce spectacle nocturne est remarquablement immuable. Si l'on excepte les occasionnelles météorites, seules les planètes (et bien entendu la Lune) se meuvent dans le ciel nocturne, sur ce qui semble être un chemin : l'écliptique. Ce sont ces processions, perçues comme irrégulières, et ces occasionnelles conjonctionsqui sont les bases empiriques des théories astrologiques. Mercure et Vénus, qui sont plus proches du Soleil que l'est la Terre, semblent accompagner le Soleil, se trouvant tantôt « devant », tantôt « derrière » celui-ci (sur le chemin de l'écliptique), ce qui donnera lieu à des explications animistes.


La Lune, Mercure et Vénus presque en conjonction. Les planètes du système solaire et la Lune se déplacent sur ce qui semble être un chemin invisible, l'écliptique.
Selon certaines analyses, l'astrologie serait née du constat de relations entre des phénomènes terrestres et ces mouvements apparents (comme les saisons ou la conjonction entre la position de la Lune et du soleil et les marées) conduisant l'homme à créer un lien de cause à effet entre eux et parfois à diviniser les corps célestes. Dès lors, un travail d'observation (calcul des éphémérides, production de calendriers) aurait été mené de front avec un travail distinct d'interprétation d'abord à partir du soleil et de la lune seulement ("Luminaires") puis à partir de l'ensemble connu des corps célestes du système solaire.
L'idée d'une correspondance symbolique entre la configuration céleste et les affaires du monde a progressivement conduit à la construction d'unsymbolisme astrologique.
Cette correspondance n'est d'ailleurs pas toujours analysée comme une influence des astres sur les affaires du monde (par laquelle l'humain ou les circonstances seraient déterminés par la position des astres, l'interprétation la plus populaire de l'astrologie), mais comme un miroir céleste des affaires du monde, qui ne l'influence pas mais le reflète, une lecture de la vie offerte aux hommes par les forces de la nature.
Les différents niveaux d'interprétation (conjectures physiques et conjectures humaines) cohabitent un certain temps, puis vont progressivement en se dissociant. Ce développement des pratiques donnera naissance à l'astronomie (qui s'en tient à l'observation, à la description et aux prédictions calendaires), laissant à l'astrologie les aspects ésotériques de conjectures sur les liens entre le ciel et la conduite des activités humaines.
Son support étant les astres, l'astrologie est l'une des pratiques divinatoires particulièrement répandues dans l'histoire des cultures. On peut ainsi citer l'existence spécifique d'astrologies mayaarabeégyptiennechinoiseindienne et bien sûr occidentale (dont il est principalement question dans cet article).

Antiquité orientale

Les premiers écrits connus concernant les astres remontent à 5 000 ans, sous la forme de tablettes d'argile sur lesquelles ont été consignés tous les relevés des mouvements planétaires observés par des prêtres érudits de Mésopotamie17. Ces observations étaient faites dans un cadrereligieux18. Le mouvement des astres étant perçu comme volonté divine, les prêtres ou astrologues servaient de traducteurs. Leurs connaissances étaient celles d'initiés, les enseignements des temples étant tenus secrets19. L'astrologie fut longtemps le privilège des seuls souverains. Cela peut être considéré comme l'origine de l'astronomie. La fonction de prêtre était liée à celle d'astrologue, car dans l'esprit des Babyloniens, des sacrifices ou des rites expiatoires pouvaient concilier les dieux20. Le fatalisme astral se développa tardivement, après la conquête de la Babylonie par le roi Perse Cyrus en 539 av. J-C. et la confrontation avec la doctrine de Zarathoustra21.
La croyance en la prédétermination du caractère et de la destinée ouvrit la voie à l'astrologie individuelle. Les plus vieux horoscopes22 connus proviennent de Babylone et datent de 410 av. J.-C23. L'historien W. E. Peuckert parle d'une première division du zodiaque en onze secteurs24 opérée par les Sumériens qui serait devenue une division en douze secteurs du fait des Babyloniens. Selon Jean-Pierre Nicola 25, les premiers thèmes astraux individuels sont apparus lors du ve siècle avant notre ère, avec une référence à douze signes. Ces douze signes sont énumérés dans un texte cunéiforme datant de 419 av. J.-C. ; il s'agissait alors d'un zodiaque sidéral (correspondant aux constellationsdu zodiaque)26.
Parallèlement à cette astrologie, des systèmes différents se forment en Chine, en Amérique précolombienne et sans doute dans d'autres civilisations. Mais l'astrologie chinoise et l'astrologie chaldéenne sont les seuls systèmes ayant perduré jusqu'à nos jours. Tous les systèmes d'astrologie actuellement connus dérivent d'un de ces deux systèmes (ou des deux, cas de l'astrologie tibétaine).
En Inde, les astrologues n'étaient pas d'anecdotiques prédicateurs. Ils avaient construit une « science des lumières célestes » et proposaient des remèdes pour les soucis du quotidien.

Antiquité gréco-romaine

De Chaldée, l'astronomie-astrologie se répand en Grèce après les conquêtes d'Alexandre le Grand27. De là, elle se diffusera dans tout l'empire grec, en Inde, en Égypte puis jusqu'à la Rome antique tout en devenant plus structurée, moins religieuse et donc plus populaire. En Grèce, Hippocrate et Galien (à l'exemple, sans doute, des prêtres égyptiens) feront de l'astrologie l'un des fondements de la médecine, associée à la théorie des quatre éléments qui existait déjà auparavant28Platon tient les astres pour « vivants divins et éternels », des « dieux visibles » (Timée, 39e-40d).
Dans son Histoire de l'astrologie29, Wilhelm Knappich a écrit : « Sous l'influence des philosophes et des mathématiciens grecs, la divination babylonienne qui avait jusque-là un caractère général (N.B. : il veut dire collectif) devint l'astrologie individuelle hellénistique, création étrange se situant entre la religion astrale et la science, entre la spéculation métaphysique et l'expérience objective. Elle est parvenue jusqu'à nous avec ses contradictions et ses énigmes. »
La première synthèse magistrale de l'astrologie occidentale, le Tetrabiblos, fut écrite par l'alexandrin Ptolémée à l'époque de la domination romaine en 140, posant les principes de ce qui va devenir l'astrologie moderne. Ce dernier a laïcisé l'astrologie héllénistique, ne faisant pas référence aux dieux grecs dans son exposé théorique, ce qui a permis sa large diffusion dans les mondes arabe et chrétien du Moyen Âge30. Compilateur plutôt que praticien, à la différence de Vettius Valens, Ptolémée a cherché à bâtir un modèle rationnel pour l'astrologie basé sur la doctrine aristotélicienne causaliste31 et il a écarté les éléments qui le gênaient32. En particulier, les maisons astrologiques se voient attribuer une faible importance dans le Tetrabiblos33 alors que Vettius Valens, qui est jugé plus représentatif des pratiques horoscopiques de cette époque, leur a accordé une grande place dans son œuvre34.
Successeur d'Hipparque, qui a découvert la valeur de la précession des équinoxes35, Ptolémée a remplacé le zodiaque sidéral, qui prenait pour point de repère une étoile fixe36, par le zodiaque tropical commençant au point vernal. D'autres l'avaient précédé dans cette démarche, mais c'est l'autorité de Ptolémée qui fit vraiment école37.

Astrologie arabe



Zodiaque arabo-Musulman du xiiie siècle - Les douze signes ainsi que les sept planètes sont représentés par les caractéristiques classiques, assimilés à un dieu du Panthéon.
En l'an 529, l'empereur Justinien fit fermer les écoles de philosophie d'Athènes. Les érudits de l'époque, les maîtres du néo-platonisme, se réfugièrent à Gundishapur chez les Sassanides en Perse. L'astronomie, la médecine, la philosophie, etc. se développèrent intensément dans cette académie de Gundishapur où confluèrent des érudits de tous bords. Les conquêtes musulmanes s'emparèrent de Gundishapur qui avait une grande réputation. Cette école de Gundishapur eut une grande influence sur le développement de la civilisation arabo-musulmane. À la demande des califes, les auteurs de l'Antiquité, notamment Aristote furent traduits en arabe, souvent depuis le persan ou le syriaque. Vers 850, Alkindi (c'est-à-dire Ya' kûb ibn Isâk Sabbâh al Kindi), originaire de Bassorah, traduisit de nombreux textes en arabe, dont ceux d'Aristote, mais il écrivit aussi plus de 200 traités sur tous les sujets possibles, dont l'astronomie, qui à l'époque ne se distinguait pas de l'astrologie. Une de ses contributions la plus importante fut sa doctrine des conjonctions entre les planètes et leur influence sur les phénomènes naturels et sur les impulsions donnant naissance aux grands événements historiques. Son disciple, Albumasar(mort en 886) fut un astrologue de Bagdad qui propagea les idées d'Al-Kindi dans son « Liber magnarum coniunctionum » lequel eut une forte influence sur l'astrologie du Moyen Âge38.
Un autre astrologue important fut Thébit (mort en 901). Il était Sabéen, originaire d'Harran, où il recueillit les connaissances astrologiques mésopotamiennes qui vinrent enrichir les connaissances arabo-musulmanes. Il vécut à Bagdad et devint l'astrologue du calife d'Antioche. Il enseignait notamment que chaque planète possédait un daemon, c'est-à-dire un esprit ou une intelligence qui la guidait. L'astrologie arabe s'est tout spécialement développée grâce à l'afflux des érudits perses, syriens, juifs, etc. qui à partir de 850 affluèrent vers les nouveaux centres intellectuels créés par les califes de l'Islam. Le JuifMashallah par exemple vécut à la cour d'Al Mansur. Il fut l'auteur d'une vingtaine de traités d'astrologie39.
À la suite de l'occupation de l'Espagne par les Maures, l'astrologie revint en force dans la civilisation européenne au Moyen Âge39.

oyen Âge[modifier | modifier le code]



Le jugement dernier, peinture en style orthodoxe byzantin sur les murs du monastère Voroneţ construit en1488 en Roumanie. On y voit, à gauche, le Paradis avec les Sants et l’Arbre de la Vie ; à droite les enfersavec des démons et le Feu qui descend dans les abysses, et, en haut, l’image contemplative du Christ tout puissant. À droite et à gauche du Christ, on voit les signes du zodiaque40.
Pendant la période chrétienne, l’astrologie connaîtra une situation ambigüe. Mise au ban de la société par l’Église, comme toutes les pratiques divinatoires, lors du concile de Tolède de l’an 447, elle est pratiquée dans les cours royales, et continue à être étudiée par les érudits, même religieux (Albert le Grand, maître de Thomas d'Aquin, est l’auteur d’un traité d’astrologie). Charles V s’occupait d’astrologie et fonda à Paris un collège d’astrologues. Louis XI consultait les siens en toutes circonstances. Catherine de Médicis avait fait élever en son hôtel (Hôtel de Soissons) une colonne qui aurait pu servir à consulter les astres. Elle rencontra Nostradamus et eût plusieurs astrologues personnels, dont le nommé Côme RuggieriLouis XIII fut surnommé le juste, parce qu’il était né sous le signe de laBalance. L’astrologie est également en faveur sous les empereurs Charles IV, et Charles Quint avait prescrit l’enseignement de cette discipline, ce que préconisaient d’ailleurs beaucoup d’hommes éminents de l’époque. Elle fut à l’honneur à Rome sous les papes SixteIVJules IILéon X, et Paul III.

Renaissance[modifier | modifier le code]

À la Renaissance, la découverte de l’héliocentrisme du système solaire, qui pourtant a été imaginé et défendu par les astronomes / astrologues de l’époque, vient mettre à mal, selon certains, l'anthropocentrisme de l’astrologie : Pic de la Mirandole (puis Jérôme Savonarole reprenant les arguments de celui-ci) l’ont largement condamnée. Ce n’est pas le cas d’astronomes et astrologues commeGalilée et Kepler de même que Tycho Brahe, ou Cassini, le premier directeur de l’Observatoire de Paris.
Dans la préface de ses Tables RudolphinesKepler fait observer que l’astrologie, toute folle qu’elle est, est la fille d’une mère sage, et que la fille folle est indispensable pour soutenir et faire vivre sa mère. Ce commentaire sera interprété par Voltaire, dans son Traité sur la tolérance (1767), de manière restrictive : « La superstition est à la religion ce que l’astrologie est à l’astronomie, la fille très folle d’une mère très sage ». La citation de Kepler a été souvent reprise erronément, et l'est encore aujourd'hui41,42 pour soutenir la thèse que les grands esprits de la Renaissance comme Galilée, Cassini ou Kepler n'étaient astrologues que par contrainte, pour avoir les moyens de s'adonner à la véritable science :
« Souvent les travaux astrologiques de Kepler et Tycho Brahe sont invoqués par les défenseurs de cette pseudo-science. Kepler est pourtant très clair sur sa valeur et justifie sans ambiguïté la pratique des prédictions en disant que la vénale astrologie permettrait à l'astronomie de vivre. »
— Éric Lindemann (1999) L'astronomie Mécanique : une introduction par l'histoire de l'astronomie43
Elle ne visait pourtant que l'astrologie populaire, tant décriée pour ses excès et superstitions : « La philosophie, et par conséquent l'astrologie authentique, témoigne de l'œuvre de Dieu et est donc sacrée. Ce n'est en aucune manière une chose frivole. Pour ma part, je ne souhaite pas la déshonorer. »44 Dans le titre d'un manifeste adressé aux intellectuels de son temps, Kepler leur demande d'écouter, dans cette controverse sur l'astrologie, une troisième voix, d'où son titre abrégé, Tertius Interviens (Warnung an etliche Gegner der astrologie das Kind nicht mit dem Bade auszuschütten - « avertissement aux adversaires de l'astrologie afin qu'ils ne jettent pas le bébé avec l'eau du bain »). La première (celle des médecinsphilosophes et théologiens) ordonne d'abandonner l'astrologie, qui ne serait qu'une superstition—la « fille folle de l'astronomie ». La seconde, celle des astrologues populaires, voudrait la conserver, avec toutes ses superstitions.
« J'ai souvent exprimé combien il était mal avisé de rejeter une chose complètement à cause de ses imperfections; par ce procédé, même la science médicale n'aurait été épargnée (...) Un nombre modeste de prédictions d'événements (de nature générales) effectuées au moyen de la prédiction des mouvements célestes sont bien fondées dans notre expérience45 »
— Kepler, Johannes. (1610) Tertius Interviens. Extraits traduits dans Kepler's Astrology (Excerpts selected and translated) Dr Kenneth G. Negus En ligne.Galilée, comme son confrère, ne doutait aucunement de la valeur de l'astrologie, bien au contraire : cela lui valut ses premiers ennuis avec l'Inquisition46. Depuis le Moyen Âge, et Thomas d'Aquin en particulier, il s'exerçait une lutte d'influence au sujet des événements célestes : Roger Bacon, « père de l'empirisme moderne », en aurait été une des premières victimes, puisqu'il aurait été emprisonné pour avoir osé affirmer que la naissance de Jésus de Nazareth était sous l'influence d'uneGrande Conjonction (conjonction Jupiter-Saturne).
Le clergé surveillait ces astrologues qui, au cours de leurs prédictions, tendraient à franchir la limite qui sépare l'astrologie et la théologie, et remplaceraient la grâce de Dieu par le déterminisme des astres. Galilée, dont on a conservé notamment le thème et celui d'une de ses filles, voyait les planètes comme d'importants facteurs causaux dans le développement de la personnalité, sans toutefois être aussi déterministe que ses accusateurs le prétendaient46. En effet, en 1604, un de ses domestiques, Signor Silverstro, l'aurait dénoncé aux autorités entre autres pour avoir professé une doctrine du fatalisme astral, pour (haver ragionato che le stelle, i pianeti at gl'influssi celestine necessitino.« avoir raisonné que les étoiles, les planètes et les influences célestes déterminaient (les événements) », accusation de la plus grande gravité pour l'Inquisition46.
Loin de se rétracter lors de la publication du texte fondateur de l'astronomie moderne, le Sidereus Nuncius, où il décrit le comportement des corps gravitant autour de Jupiter, il récidive, en appelant, comme il le fera lors de sa confrontation avec Bellarmin, à l'observation plutôt qu'à la théorie47, à la persuasion des non-scientifiques plutôt qu'aux argumentations avec les tenants des dogmes établis48
« Alors, qui ne sait pas que la clémence, la bonté du cœur, la douceur des mœurs, la splendeur de sang royal, la noblesse dans les fonctions publiques, une vaste étendue d'influence et de pouvoir sur les autres, qui ont tous fixé leur demeure commune et siègent en votre Altesse - qui, Dis-je, ne sait pas que ces qualités, en fonction de la providence de Dieu, de qui toutes les bonnes choses viennent, émanent de l'étoile la plus bénigne, de Jupiter? », une émanation relayée par l'ascendant de son Altesse :
« Jupiter, Jupiter, dis-je, au moment de la naissance de Votre Altesse avait déjà passé la lenteur des vapeurs ternes de l'horizon et occupait le Milieu du Ciel, à partir de quoi il éclairait l'angle de l'Est... » (angle de l'Est qui était régi par Jupiter puisque le monarque avait le Sagittaire à l'ascendant, comme le souligne Galilée46.
Dès lors, il peut paraître étonnant que Galilée, tout comme Képler, aient entretenu des doutes sur la place véritable de l'astrologie au sein de la science. Tandis que Képler voyait dans la bonne astrologie une indication de tendances générales, et surtout une branche fondamentale de la philosophie44, Galilée exprimait son étonnement devant ledéterminisme astral absolu d'un Morin de Villefranchemathématicien à Paris :
« Je suis étonné que Morin tienne en une estime extrêmement élevée l'astrologie judiciaire [l'astrologie prédictive] et sa conviction que ses conjectures (qui me semblent incertaines, sinon très incertaines) puissent établir la certitude de l'astrologie, et ce serait vraiment une chose merveilleuse si -- comme il le promet -- il pouvait, rusé comme il est, placer l'astrologie à la plus haute position des sciences de l'homme, et je vais attendre avec beaucoup de curiosité de voir cette innovation merveilleuse. »
En France, sous la pression des jésuitesColbert la raye finalement des disciplines académiques et en interdit l’enseignement en faculté en 1666. Le poste d’astrologue royal est supprimé à cette époque. Un Essai de justification de l’astrologie judiciaire (BM. Angoulême MS 23) 1696 ne sera jamais publié[réf. nécessaire].
En Angleterre, elle ne sera rayée des disciplines académiques qu’un siècle plus tard. Isaac Newton l’étudie encore en université, « pour voir ce qu’il y a de vrai ». Pour des raisons religieuses, il s'opposait à l'astrologie judiciaire, mais ne contestait pas pour autant un lien astrologique entre les astres et les affaires humaines49. Dans sa Chronology of Ancient Kingdoms, Amended(Chronologie des anciens royaumes, amendée), il décrit comment l'astrologie serait née de sa mère, l'astronomie :
« After the study of astronomy was set on foot for use of navigation... and Nechepsos (sic) or Nicepsos (sic) King of Sais, by the assistance of Petosiris a Priest of Egypt, invented Astrology, grounding it upon the aspects of the Planets, and the qualities of the men and women to whom they were dedicated.... »50
De fait, les premières tables lunaires calculées ensuite d’après la théorie de Newton, furent d’abord destinées à servir aux observations des astrologues[réf. nécessaire].


Mosaïque du vie siècle de la synagogue de Beit Alpha, Israël, représentant les signes du zodiaque.
Le judaïsme pour sa part, en dépit de mises en garde dans le Talmud à propos du Mazal – terme qui désigne les constellations – fait largement appel, au Moyen Âge, à l'astrologie pour ses commentaires de la Bible, notamment chez Abraham Ibn Ezra, par ailleurs auteur de traités d'astrologie qui seront traduits en ancien français et en latin51. Mais l'influence de Maimonide marquera durablement le judaïsme moderne par son rejet de l'astrologie avec sa Lettre aux Juifs de Provence et son Épître au Yémen, où l'on dénonce l'incapacité des astrologues de Pharaon et de Nabuchodonosor II de prévoir leur future débâcle.

Des Lumières à l'époque moderne[modifier | modifier le code]

L'astrologie est considérée par les penseurs des Lumières comme l'exemple archétypal de la superstition, de la croyance dans des forces occultes et supérieures52. Pour eux, combattre l'astrologie semble relever d'un combat général ainsi que d'un engagementpolitique en faveur de la laïcité et du rationalisme, contre l'obscurantisme. Assez paradoxalement, leurs arguments critiques contre l'astrologie apparaissent moins logiques que rhétoriques (utilisation d'arguments principalement polémiques53 ou d'autorité54 plutôt qu'une démarche raisonnée).
En cette toute fin du xviiie siècle, époque du rationalisme triomphant, le divorce entre l'astronomie et l'astrologie est ainsi finalement prononcé. En France, l'astrologie se cantonna longtemps à des milieux ésotérico-clandestins (spiriteskabbalistesthéosophes...)55. Dans l'Empire britannique, son statut évolua avec le théosophe Alan Leo, qui en fit plus un outil d'analyse caractérologique que de prédiction, tout en soutenant que Le caractère fait le destin56.
L'astrologie réapparaît dans le champ scientifique par la porte de la psychologie des profondeurs. Au cours de son exploration des symboles anciens, Carl Gustav Jung dit découvrir, contre toute attente, une relation tenace entre l'astrologie et la psychologie :
« Ce qui est surprenant, c'est qu'il y a vraiment une curieuse coïncidence entre les faits astrologiques et les faits psychologiques, de sorte que l'on peut isoler un moment dans le temps à partir des caractéristiques d'un individu, et aussi, l'on peut déduire des caractéristiques d'un moment dans le temps. »57
Au xxe siècle, l'astrologie réapparaît dans des almanachs, magazines, puis émissions radiophoniques. L'astrologie trouve aussi une place considérable dans le mouvement New Age. Ses nouvelles versions affirment intégrer les valeurs symboliques des planètes orbitant au-delà de Saturne et des astéroïdes ainsi que de nouvelles théories, comme l'astrologie statistique.

Pratiques actuelles[modifier | modifier le code]



Les signes du zodiaque, gravure sur bois du xvie siècle
L'astrologie recouvre au début du xxie siècle des pratiques et des approches très différentes, au point qu'il est plus juste de parler d'astrologies au pluriel.
Il existe de nombreuses écoles : astrologie psychologique, astrologie conditionalisteastrologie karmiqueastrologie humanisteetc..
Ces pratiques astrologiques diffèrent à la fois par leurs symboliques, par les techniques utilisées, et selon les objets ou domaines auxquels elles sont appliquées, que ce soit par exemple en psychologie, ou comme technique de prévision, en politique, en bourse, en médecine ou encore à la marche du monde (Astrologie mondiale). La symbolique des astres et de leurs mouvements est très souple, pouvant changer suivant le contexte et l'école de l'astrologue. Chaque objet a des symboliques propres et parfois des techniques particulières.
Les astrologies les plus en vogue actuellement en occident sont l'astrologie occidentale, fondée sur le calendrier solaire, et l'astrologie chinoise, fondée sur le calendrier chinois. Cette dernière s'est répandue en Europe occidentale vers la fin des années 1970[réf. nécessaire].
Si sa pratique de base reste l'établissement d'une carte du ciel, l'astrologie occidentale est en constante évolution, ce qui induit un certain nombre de divergences entre astrologues. Ces divergences existaient dès l'époque traditionnelle, portant entre autres sur les différentes méthodes pour le calcul des positions des maisons, et renvoyant surtout à différentes écoles d'interprétation.
Au xxe siècle, l’astrologie connaît un regain d’intérêt avec une approche nouvelle. Des ingénieurs, psychologues et statisticiens abordent cette discipline à l'aide d'une approche statistique.
Aujourd'hui, on peut diviser l'astrologie occidentale en trois branches :
  1. une astrologie individuelle, qui s'intéresse au thème de naissance d'un individu,
    • soit sous l'angle de sa psychologie pour lui faire prendre conscience de lui-même (astrologie fortement influencée par la psychologie et les approchespsychanalysantes) ;
    • soit sous l'angle de son chemin de vie, pour lui indiquer les différentes phases de sa vie, moments de transformation, et périodes critiques ;
    • soit sous l'angle de ses relations avec les autres, en mettant en relation les thèmes de naissance de plusieurs personnes.
  2. l'astrologie des horoscopes, directement héritée du Moyen Âge, remise en vogue par les magazines commerciaux dans sa version populaire, qui prétend prédire pour chaque signe astral, les grandes tendances du moment. Cette astrologie devrait probablement plus être considérée sous l'angle du phénomène social, car elle est extrêmement populaire malgré son imprécision fondamentale. Pour cette raison, cette caricature de l'astrologie discrédite probablement l'astrologie « sérieuse ». Fondé (quand il est établi sérieusement) sur une version simplifiée des modèles astrologiques classiques, l'horoscope est généralement considéré par le public qui en est friand, comme une simple distraction sans implications.
  3. l'astrologie événementielle, qu'il s'agisse de prédire les grands évènements (Astrologie mondiale) ou l'évolution de la bourse. L'astrologie boursière a fait son apparition dans les années 1930, avec Gustave Lambert Brahy, son but étant de prévoir l'évolution des indices boursiers58.
  4. l'astrologie en cartomancie, qui affine les prédictions des tirages de cartes grâce aux influences astrales représentées sur les lames d'oracles. Les planètes ou astres du système solaire deviennent ici support de voyance.
Ces pratiques sont aujourd'hui toutes sujettes à critiques et à controverses. Malgré l'apparence scientifique que pourraient donner l'usage affiché de calculs compliqués, la précision des dates de naissance (heure, géographie...) et le recours quasi-systématique à l'ordinateur, l'astrologie est considérée comme une pseudo-science (ou superstition) par la communauté scientifique.